Le festival du film vert proposait cette année dans son programme le nouveau documentaire de Marie-Monique Robin intitulé Sacré croissance.
Ce documentaire interroge le spectateur quant à la situation actuelle de notre modèle économique mondial. Peut-on croître indéfiniment dans un monde fermé et aux ressources par définition limitées ? Il ne s’agit ici pas de prôner la décroissance acharnée, mais bien de réfléchir aux alternatives à cette croissance qui nous a certes permis un bond en avant phénoménal en matière de progrès au XXe siècle, mais qui se révèle être au final un substitut addictif et mortel pour nos sociétés, que ce soit au niveau social, économique ou écologique. En quoi les logiciels libres s’inscrivent-ils dans ce débat ?
Le documentaire de Marie-Monique Robin ne se perd pas en descriptions interminables des dégâts sociaux et environnementaux imputés à cette croissance soutenue envers et contre tout par nos dirigeants. Elle s’attelle surtout à décrire les alternatives innovantes qu’elle a pu découvrir au cours de ses voyages ainsi que le fossé qui sépare le discours dominant des dirigeants nationaux des actions entreprises par des communautés locales.
Que ce soit à Toronto, en Argentine, au Brésil ou au Bhoutan, des initiatives citoyennes voient le jour en réaction à la crise économique structurelle qui s’installe et face à l’impuissance des commutés locales d’influencer les grands flux financiers globalisés. Pourquoi un petit boulanger d’une province reculée devrait subir la dévaluation de sa monnaie et l’explosion du prix de sa farine, provoquées par des mécanismes globalisés complexes composés de dettes internationales, de marchés financiers et de spéculations ? Ces injustices poussent en effet ces populations à réagir.
Une des formules du développement durable est de penser global pour agir local. Cette maxime est ici adaptée en « Penser local pour agir local ». Toutes ces initiatives partagent en effet les critères suivants :
- Initiatives citoyennes (on part du bas).
- Soutien des administrations publiques locales, mais pas au démarrage, dans un deuxième temps.
- Absence ou faible soutien politique.
- Réappropriation de la vie citoyenne par les citoyens, démarche démocratique et participative.
- Évitement des intermédiaires et des grands acteurs centralisateurs du marché.
- Création de communautés, géographiques ou autour d’une thématique propre.
- Focalisé sur les besoins réels de la population dans une perspective de durabilité.
Il est clair que les logiciels libres, en tant qu’outil informatique performant, peuvent tout à fait être utilisés à des fins contraires à la durabilités. N’importe quelle société d’armement, de production d’énergie atomique, ou d’extraction de ressources fossiles peut voir dans les logiciels libres une opportunité d’indépendance et de performances à moindre coûts. Mais l’essence même des logiciels libres, c’est-à-dire les valeurs qui sous-tendent ce mouvement, se rapprochent étonnamment des critères énoncés ci-dessus.
Les logiciels libres favorisent l’économie de la fonctionnalité et l’efficacité vis-à-vis d’un besoin exprimé. Une application libre mal fagotée sera très rapidement oubliée. Si un besoin existe pour exploiter une infrastructure informatique plus ancienne et donc pour allonger sa durée de vie et réduire son impact environnemental, des logiciels libres adaptés s’y prêteront parfaitement. L’obsolescence programmée s’avère très difficile à mettre en place dans les logiciels libres grâce à justement l’ouverture du code. Enfin, une application libre peut facilement être adaptée à des besoins spécifiques ou locaux sans avoir à faire appel à des opérateurs globaux et naturellement fort peu intéressés à investir dans des économies très locales. Les similitudes sont légions.
En conclusion, on peut dire que, sous l’angle informatique, les logiciels libres représentent une opportunité de soutien aux alternatives de la croissance dans notre société.
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