Le modèle propriétaire

Licence propriétaire

Un éditeur de logiciels dit propriétaire transmet son produit sous la forme d’un contrat de licence d’utilisation en général payant [1]. Dans le monde de l’entreprise, le client doit en plus payer annuellement une somme, appelée maintenance, pour assurer un support informatique (par téléphone et courriel) et l’accès aux futures mise-à-jours mineures. En cas de nouvelles versions, le client doit en général racheter le logiciel. De plus, ces logiciels sont souvent vendus pour un nombre fixe d’utilisateurs et la copie est formellement interdite.
Ces particularités lui ont aussi valut le nom de licence privative, sous-entendu, privative de liberté.

Les plus grands éditeurs de logiciels propriétaires sont Microsoft, Apple, Adobe, HP, Oracle, SAP, etc… Leur modèle économique s’avère souvent similaire et ils disposent de montants colossaux pour le marketing, la publicité et l’avant-vente.

Dépendance technologique

Une des particularités du modèle propriétaire est de cacher volontairement le code source, sorte de recette de fabrication du logiciel. Les formats de fichiers de sauvegarde (comme les documents Adobe Photoshop *.psd) sont eux-aussi « codés » afin d’en dissimuler la logique interne [2].
La propriété intellectuelle des créateurs est certes protégée, mais au prix d’une opacité quasi totale du fonctionnement interne des logiciels vendus. Sans compter que ce modèle favorise la dépendance du client à un logiciel ou à une famille de logiciels distribués par ce même éditeur [3].

Obsolescence programmée

Les éditeurs propriétaires sont naturellement intéressés à voir leurs clients renouveler leurs licences et à racheter de nouvelles versions de leurs applications. Ils sont souvent incités à prévoir à l’avance l’obsolescence de leurs logiciels pour provoquer de manière anticipée des mise à jour chez leurs clients. L’incompatibilité (partielle ou totale) entre des fichiers de versions différentes (par ex: docx vs doc) est l’un des moyens les plus pratiques pour déclarer officieusement une version d’un logiciel obsolète et promouvoir la nouvelle version.
L’obsolescence programmées est également visible lorsqu’une nouvelle version d’un logiciel exige des capacités matérielles démesurées pour pouvoir fonctionner, ce qui incite l’utilisateur à renouveler son ordinateur. Ce phénomène est souvent constaté entre des éditeurs de logiciels propriétaires et des fabricants d’ordinateurs ou de composants, liés par des accords commerciaux croisés [4].

Abus de position dominante

Le modèle privatif se révèle être un excellent système pour renforcer une position dominante, protéger ses intérêts financiers et torpiller l’innovation. On le voit avec les GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft), de gigantesque conglomérats économiques opaques, tirant la plus grande partie de leurs bénéfices des brevets, de la publicité et de l’utilisation des données personnelles des utilisateurs. La Free Software Foundation dresse la liste des 7 péchers capitaux de l’un d’entre-eux : Microsoft [5]. Cette analyse considère le cas de Windows 7, mais les versions suivantes (et notamment Windows 10) démontrent une aggravation inquiétante de ces tendances [6].

Mépris de la vie privée

Le fonctionnement interne des logiciels privatifs étant secret, le citoyen et plus largement la société civile, n’a pas la possibilité de réellement savoir ce qu’ils font ni ce qu’ils envoient comme information sur internet. Depuis le milieu de la première décennie du XXIe siècle, le modèle d’affaire à changé et certains produits, souvent très attractifs, sont proposés gratuitement ou à des prix relativement bas aux utilisateurs. Il ne s’agit cependant pas de philanthropie : c’est l’utilisateur lui-même et ses données personnelles qui représentent la valeur marchande.

Argumenter que l’on ne se soucie pas de la protection de sphère privée parce que nous n’avons rien à cacher revient à ne pas se soucier de la liberté d’expression parce qu’on n’a rien à dire. Edward Snowden [7]

La plupart des acteurs informatiques qui collectent les données personnelles des internautes à leur insu, expliquent que c’est uniquement pour améliorer l’efficacité de leurs produits. En réalité, ces données sont utilisées bien plus largement et de manière fort lucratives par ces acteurs :

  • Ciblage publicitaire intrusif;
  • Espionnage économique international;
  • Profilage massif des citoyens sous couvert de lutte contre le terrorisme;
  • Analyses à larges échelles pour anticiper des tendances dans la société (big data).

Ce commerce de données d’un nouveau genre se déroule dans l’ombre et sous le sceau du secret, mêlant souvent entreprises privées et États sans aucun contrôle démocratique.

Le documentaire CITIZENFOUR de Laura Poitras [8] dévoile notamment ces dérives par la voix d’Edward Snowden.


Références

  1. Note: Le terme propriétaire fait référence au fait que l’auteur du logiciel reste détenteur des droits de propriété et d’usage de son logiciel – Art. Logiciel propriétaire, Wikipedia: http://fr.wikipedia.org/wiki/Logiciel_propri%C3%A9taire
  2. Art. Correspondance entre formats ouverts et formats fermés, Wikipedia: http://fr.wikipedia.org/wiki/Alternatives_ouvertes_aux_formats_ferm%C3%A9s
  3. Art. Enfermement propriétaire, Wikipedia: http://fr.wikipedia.org/wiki/Enfermement_propri%C3%A9taire
  4. Art. Obsolescence programmée, Wikipedia: http://fr.wikipedia.org/wiki/Obsolescence_programm%C3%A9e
  5. Les 7 péchers capitaux de Windows 7: http://fr.windows7sins.org/#7
  6. Art. Windows 10 : votre vie privée mise à mal par défaut: http://www.cnetfrance.fr/news/windows-10-votre-vie-privee-mise-a-mal-par-defaut-39823230.htm
  7. Art. Notion de sphère privée par Edward Snowden (en anglais): http://mic.com/articles/119602/in-one-quote-edward-snowden-summed-up-why-our-privacy-is-worth-fighting-for
  8. Art. CITIZENFOUR, Wikipedia: https://fr.wikipedia.org/wiki/Citizenfour

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