Cuisine libre

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Voici une petite métaphore rigolote qui pourrait éclairer le lecteur sceptique quant à l’utilisation des logiciels libres par des non-initiés.

Légumes bio

Source : Ecologically grown vegetables CC BY-SA 3.0 – Wikimedia


Maurice[1] ne sait pas cuisiner. Il n’a pas le temps et ne s’y est jamais vraiment intéressé. Au centre commercial, il achète des plats pré-cuisinés. Il n’y a pas beaucoup de choix, mais ça ne demande que 3 minutes de cuisson au micro-ondes. On ne sait pas vraiment bien ce qu’il y a dans ces plats pré-cuisinés, mais une chose est sûre, le goût ne change pas d’une fois à l’autre.

Il paraîtrait que ces plats pré-cuisinés ne sont pas très bons pour la santé. Pourtant, l’odeur à la sortie du micro-ondes et le goût sont plutôt flatteurs et Maurice aime bien ce goût qu’il retrouve dans plusieurs plats pré-cuisinés différents.

A côté de cela, il y a les produits frais. Des connaissances de Maurice lui ont dit qu’ils étaient beaucoup moins chers et meilleurs pour la santé. En plus, il semblerait que les cuisiniers professionnels s’en servent.

Fort de cette constatation, Maurice achète un cageot de légumes et des œufs frais au marché, puis les met tels quels trois minutes au micro-ondes. Le résultat est dramatique : cette nourriture est tout bonnement immangeable et son four est ruiné suite à l’explosion des œufs.

Maurice s’informe auprès de son entourage et lit quelques recettes sur Internet. Il s’arrache les cheveux face à  un jargon incompréhensible, comme « déglacer au Grand Marnier », « brunoise de légumes » ou « épaissir au roux blond ».

Changeant d’approche, Maurice. s’inscrit sur un forum et poste une demande d’aide : HELP, j’ai mis des œufs au four, 3 minutes à 900W, tout a explosé, que faire ? Le premier intervenant à lui répondre lui fait remarquer qu’il faut dire « four MICRO-ONDES » et pas « four », pour ne pas prêter à confusion. Le second lui suggère de lire le mode d’emploi de son four micro-ondes et notamment les mises en garde. Maurice est un peu agacé par la pédanterie de ces cuisiniers qui ergotent sur la terminologie au lieu de lui proposer des solutions.

Lassé, Maurice décide qu’il lui sera plus simple, pour sa première dégustation de produits frais, de faire appel à un professionnel, et se rend au restaurant. Il commande un steak de bœuf aux champignons. C’est plutôt bon mais pas assez salé. Arrive l’addition, du coup très salée : 48.- le steak de bœuf. Au supermarché, le steak coûte 10.- et les champignons 2.- au maximum. Comment ces cuisiniers osent-ils surfacturer à ce point leurs prestations ? 36 francs pour glisser une barquette dans un four, le régler sur 3 minutes et appuyer sur start ? C’est tout bonnement inadmissible.

Maurice retourne sur Internet, et tombe par hasard sur le forum d’une émission consacrée a la cuisine. Il y rédige une longue diatribe décriant les produits frais. Il y explique posément que les produits frais, c’est immangeable. On lui avait aussi dit que c’était moins cher, mais c’est un mensonge éhonté ; au final, il faut payer un cuisinier très cher pour les préparer. C’est n’importe quoi, ces produits qu’on ne peut pas préparer en les mettant 3 minutes au micro-ondes, ce qui est pourtant le standard universel de la cuisine. Vraiment, ça n’a aucun intérêt; ça ne peut rester qu’un fantasme dans l’esprit de quelques cuisiniers alternatifs…


Cette histoire, tirée du blog de Maxime Augier (CC BY-SA) que je remercie au passage, permet de bien comprendre la situation actuelle entre les consommateurs d’informatique privative (la grande majorité de la population) et la communauté du libre. Cette fable met en exergue les incompréhensions des uns et des autres, les difficultés de communication, et également la captivité des utilisateurs d’informatique privative, habitués depuis longtemps à des produits calibrés, standardisés, simplifiés, flatteurs sur l’apparence mais totalement opaques sur leur fonctionnement interne.

En quoi cette histoire est-elle liée au développement durable ?

Pour que notre développement deviennent plus durable, nous devons participer davantage et de manière citoyenne à ces changements. En tant qu’individu, nous devons reprendre le contrôle de notre environnement et des composantes de la société, que ce soit au niveau de notre alimentation, de notre mobilité, ou de notre consommation de produits technologiques.

Consommer des aliments bio produits localement permet de réduire notre empreinte environnementale tout en renforçant le tissus économique local et l’indépendance alimentaire de la région. Utiliser, créer, comprendre, améliorer, partager des recettes[2] permet, en plus de cuisiner ces aliments, de diffuser librement nos idées et de faire fructifier un réseau sur une base non-marchande.

Il en est de même pour l’informatique libre. Changer vers le libre ne se fait pas en un jour ni sans un minimum d’effort. Il est nécessaire de s’informer et d’essayer de comprendre soi-même, sans forcément vouloir devenir un expert. Les débuts peuvent être laborieux et difficiles, comme en cuisine, mais la persévérance permet de devenir plus autonome et plus à l’aise avec ces nouveaux outils.

On entrevoit ensuite toutes les potentialités qu’offre le libre au sens large, que ce soit pour son travail, pour élargir ses connaissances ou pour son développement personnel. On constate ensuite que nous ne sommes pas seuls. La communauté est là, derrière la toile, prête à aider celui qui débute, pour autant qu’il s’implique et apprenne à chercher les solutions par lui-même avant de faire appel à elle.


Notes

  1. Les personnages et les situations de ce récit étant purement fictifs, toute ressemblance avec des personnes ou des situations existantes ou ayant existé ne saurait être que fortuite.
  2. Cela ressemble à s’y méprendre aux 4 libertés fondamentales des logiciels libres.

cc-by-sa
Logiciels Durables / Logiciels Libres et Développement Durable

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